Au Pérou, le viol et le meurtre particulièrement terrible d’une fillette ont relancé le débat sur la peine de mort pour les auteurs de viols et de féminicides, alors que le pays a aboli la peine capitale pour les crimes de droit commun en 1979. Interrogé sur cette mesure, le président péruvien Martin Vizcarra n’a pas exclu que le rétablissement de la peine de mort pour ces crimes soit évalué par le Congrès. Une déclaration qui a suscité l'ire des féministes, alors que le débat divise les Péruviens. Dans les rues de Lima, les avis sur le rétablissement de la peine de mort pour les cas de viols ou de féminicides sont partagés. C’est le meurtre de la petite Camila, 4 ans, enlevée puis violée et assassinée dans un quartier nord de la capitale le 29 février dernier qui a relancé le débat. « Je suis pour la peine de mort, car ce sont des gens cruels qui violent des enfants et tuent des femmes. Et même quand ils promettent de changer, ils récidivent », dit une femme. « C’est une mesure populiste », pense un homme interrogé sur la question. « Qu’on renforce les peines de prison, mais pas la peine de mort ». Interrogé par des journalistes à l’occasion de la journée des droits des femmes, le président Martin Vizcarra a répondu que le rétablissement de la peine capitale pour les cas de viols ou de féminicides pourrait être évalué au Congrès. La déclaration du président a pris de court les parlementaires fraîchement élus qui n’ont pas encore commencé à siéger. Certains, comme la député de gauche et activiste féministe Arlette Contreras, ont tout de même rapidement réagi sur les réseaux sociaux en accusant le chef de l’État de populisme. ? Lire aussi : Arlette Contreras, figure emblématique des féministes au Pérou La peine de mort comme « mesure dissuasive » ? D’autres en revanche, comme Robinson Gupioc du parti de droite Podemos Peru, ont affiché leur soutien à la mise en place d’une telle mesure. « Je suis en faveur de la peine de mort pour les auteurs de viols ou de féminicides. Ce n’est pas une mesure radicale, mais ajustée à la réalité. Actuellement l’État dépense en moyenne 180 à 300 euros par mois pour chaque prisonnier. On ne peut pas se permettre une telle charge financière. C’est pour ça qu’en fonction du crime, les auteurs devraient être soumis à une sanction drastique, comme la peine de mort. Et aussi pour que les citoyens qui pensent commettre ce type de crime sachent à quoi s’en tenir ». La peine de mort comme mesure dissuasive. Un argument rejeté par les féministes. Alejandra Ballon est porte-parole du mouvement Ni Una Menos (Pas une femme de moins) qui lutte contre les violences machistes au Pérou. Pour elle, « On ne combat pas la violence par la violence. Et qu’on ne vienne pas me dire que la peine de mort a eu un effet dissuasif dans d’autres pays. C’est un mensonge. » Ce que dit la Constitution péruvienne Mais au-delà des positions des uns et des autres, il y a l’obstacle juridique, comme l’explique l’avocat constitutionnaliste Alejandro Rospigliosi : « La Constitution péruvienne reconnaît l’application de la peine de mort uniquement pour les crimes de trahison et de terrorisme. Et le Pérou a signé la Convention américaine des droits de l’homme qui interdit l’extension de la peine capitale à des crimes qui n’ont pas été précédemment envisagés par la Constitution. Donc l’étendre constituerait une violation de la Convention. » Suite aux critiques suscitées par sa déclaration, le président Martin Vizcarra est revenu sur ses propos et le ministre de la Justice Fernando Castañeda a précisé que le rétablissement de la peine de mort n’était pas à l’agenda de ce gouvernement.
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