Les révélations d’un lanceur d’alertes américain à propos d’une conversation téléphonique de Donald Trump à son homologue ukrainien, ont décidé les démocrates à lancer une procédure de destitution à l’encontre de Donald Trump.Membre des services de renseignement, le lanceur d’alerte dit avoir été informé par des membres de l’administration américaine du fait que Donald Trump ait sollicité l’ingérence de l’Ukraine dans les prochaines élections aux États-Unis. Le président Trump se dit victime d’une farce, mais il ne renie pas les propos tenus lors de cet échange téléphonique. La blague selon Donald Trump (« joke », « hoax » ou « fake news » pour reprendre les termes employés lors de ses dernières interventions), c’est l’utilisation faite – par les démocrates – des informations rendues publiques ces derniers jours, pour entamer une procédure de destitution. Pas de quoi fouetter un chat pour le président Trump, qui ne voit rien de répréhensible dans l’échange qu'il a eu le 25 juillet dernier avec son homologue ukrainien. La transcription rendue publique jette pourtant une lumière crue sur le rapport que le président Trump entretient avec son ministre de la justice, William Barr, mis sur un pied d’égalité avec son avocat personnel, Rudy Giuliani. Les deux hommes sont explicitement chargés de prendre contact avec Volodymyr Zelinskiy, afin de se pencher sur les affaires du fils de Joe Biden en Ukraine, et sur le fait que le vice-président Biden ait obtenu en 2015 le départ d’un procureur qui était censé enquêter sur la corruption en Ukraine. Trump et Zelinski s’entendent pour trouver cette conversation tout à fait normale. Un dossier « unique et sans précédent » Mais si tel était le cas, pourquoi la Maison-Blanche aurait-elle pris l’initiative de verrouiller toutes les archives liées à cet appel téléphonique, en les conservant sur un « système électronique distinct » de celui habituellement réservé à cet emploi ? Car c’est bien ce que révèle le signalement du lanceur d’alerte. L’identité de ce membre des services secrets n’a pas été révélée. Mais l’on sait que son signalement est jugé crédible par l’inspecteur général des services du renseignement, Michael Atkinson, qui a décidé de la transmettre au Congrès. Quant au directeur du renseignement national (DNI) Joseph Maguire, entendu ce jeudi 26 septembre au Congrès, il avait dans un premier temps rechigné à transmettre l’alerte. Il explique à présent que la Maison-Blanche et le ministère de la Justice consultés sur ce point ne l’y obligeaient pas et reconnaît finalement avoir affaire à un dossier « unique et sans précédent ». Le fait que la Maison-Blanche et le ministère de la Justice aient tenté d’étouffer l’affaire vient conforter les démocrates dans l’idée qu’il y a là de sérieuses raisons d’enquêter. Trump-Zelinskiy, une relation asymétrique Outre la tentative de Trump de banaliser l’affaire, le président américain affirme aussi que -contrairement aux reproches qui lui sont adressés- rien ne prouve qu’il ait fait pression sur le président Zelinskiy. C’est là qu’intervient le mensonge le plus grossier : faire croire que le président ukrainien – qui est dans une posture difficile sur son front est, vis-à-vis de la Russie – puisse se voir demander une faveur par le président américain, sans se sentir soumis à quelque obligation que ce soit. Le compte-rendu de la conversation téléphonique est éloquent. Surtout lorsque Trump affirme à quel point « les États-Unis ont fait de bonnes choses pour l’Ukraine », et d’ajouter : « je ne dirais pas que la réciproque est vraie ». Élément de contexte : au moment de cette conversation – le 25 juillet 2019 – l’Ukraine attendait encore de l’aide de la part des États-Unis – 400 millions de dollars – et notamment de l’aide militaire, que le président américain venait tout juste de geler, sans explication. Dans sa réponse à Donald Trump au téléphone, le président Zelinskiy n’y fait pas directement référence, mais il évoque le besoin pour l’Ukraine de continuer la coopération en matière de défense. Et c’est à ce moment précis que Donald Trump lui demande : « j’aimerais que vous nous fassiez une faveur ». Si le chantage n’est pas explicite, la pression est implicite, mais bien réelle.
Comentarios