Évangile de Jésus Christ selon saint Luc En ce temps-là, quelques sadducéens – ceux qui soutiennent qu’il n’y a pas de résurrection – s’approchèrent de Jésus et l’interrogèrent : « Maître, Moïse nous a prescrit : Si un homme a un frère qui meurt en laissant une épouse mais pas d’enfant, il doit épouser la veuve pour susciter une descendance à son frère. Or, il y avait sept frères : le premier se maria et mourut sans enfant ; de même le deuxième, puis le troisième épousèrent la veuve, et ainsi tous les sept : ils moururent sans laisser d’enfants. Finalement la femme mourut aussi. Eh bien, à la résurrection, cette femme-là, duquel d’entre eux sera-t-elle l’épouse, puisque les sept l’ont eue pour épouse ? » Jésus leur répondit : « Les enfants de ce monde prennent femme et mari. Mais ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts ne prennent ni femme ni mari, car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont enfants de Dieu et enfants de la résurrection. Que les morts ressuscitent, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent, quand il appelle le Seigneur le Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob. Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. Tous, en effet, vivent pour lui. » Source : AELF Méditation Père Bernard Devert Une opposition se fait jour entre les Saducéens et les Pharisiens ; les premiers nient la résurrection, les seconds y croient ; ils prennent Jésus à témoin pour assurer un arbitrage. L’argumentation des Saducéens repose sur le passage du Deutéronome 25, appelé loi du lévirat. Quelle est-elle ? La loi impose qu’un beau-frère (le Lévir en hébreu) non marié épouse sa belle-sœur veuve, si son frère n’a pas eu de garçon. Le fondement n’est point spirituel, il repose sur une approche patrimoniale, s’agissant de trouver un héritier pour éviter la dispersion des biens au sein de la famille. Le récit est présenté à Jésus jusqu’à l’absurde : la femme épousant tour à tour les sept frères, d’où la question des Sadducéens : quel sera le mari de cette femme dans la vie éternelle ? Absurde, mais n’avons-nous pas la tentation de nous représenter l’au-delà comme une prolongation, en mieux, de ce que nous vivons. Nous limitons le changement sous couvert de maîtrise pour avoir peur de l’inouï. Jésus est clair : la résurrection n’est pas le prolongement de ce monde, pas plus qu’elle est un autre-monde ; elle est un monde autrement qui, déjà, se prépare : « Père que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ». Arrêtez, dit le Christ, de vous raconter des histoires, de vous payer de mots. La résurrection est ce temps où quittant ce ghetto intérieur dans lequel nous demeurons, nous feignons de croire que la finitude peut finalement se poursuivre dans un infini à notre mesure. La résurrection est souvent entendue comme la continuation de l’entre-soi alors qu’elle est une ouverture infinie à l’autre-soi. Le Pape François dit, dans une formule imagée dont il a le génie, qu’on n’a jamais vu un camion de déménagement accompagner le corbillard… La vie chrétienne nous invite à laisser les choses derrière nous pour nous ouvrir à un avenir où, libérés de ce qui nous a rendu captifs, parfois cupides, nous entrons dans un avenir dont le devenir n’est jamais indifférent à ce que nous vivons, pas seulement pour nous-mêmes mais aussi pour les autres. Nelson Mandela, dans son allocution en 1994 l’intronisant à la Présidence de l’Afrique du Sud, l’exprime de façon très forte. « L’illumination n’est pas de nous rétrécir pour éviter d’insécuriser les autres » ; elle ne se trouve pas seulement chez quelques élus, elle est au-dedans de nous et, au fur-et-à-mesure que nous laissons briller notre propre lumière, nous donnons inconsciemment aux autres la permission de faire de même. « En nous libérant de notre propre peur notre présence libère automatiquement les autres ». Comme il est bien que des témoins aient saisi, pour l’avoir vécu, ton appel à être sel de la terre, lumière du monde.
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